« Après 27 ans de combat pour la diffusion du livre au Togo, nous déposons les armes. Venez profiter des derniers jours de la Star Librairie ». Tel est le dernier signal de détresse lancé par les responsables de « Star Librairie », en annonçant la fermeture définitive de leur boutique.
Au Togo, les librairies deviennent de plus en plus des espèces menacées. Ces sanctuaires du savoir, déjà peu nombreux dans le pays, sont en voie d’extinction, et cela se fait sans grande réaction des autorités du pays.
Après « Malidis », c’est au tour de la librairie Star de fermer ses portes, mettant la clé sous le paillasson. Son signal de détresse annonçant la fermeture de sa boutique à fait réagir certains écrivains.
« Pendant plusieurs années, j’ai vu cette librairie se battre pour la suppression des taxes sur l’importation des livres et du matériel d’imprimerie. Je les ai vus se battre contre la piraterie des livres, qui tue l’édition. Je les ai vus se battre à lancer des foires du livre, où les livres étaient bradés sans public. J’ai vu Mme Fadoul se battre à inviter des universités à venir chercher gratuitement des magazines, sans succès.
Quel est donc ce peuple qui tourne le dos aux livres, à la source inépuisable du savoir ? Pourquoi nous Togolais nous désintéressons nous aussi intensément de la lecture ? Même si ce phénomène est général en Afrique francophone, il est plus aigu au Togo. Je vends souvent plus mes livres au Bénin qu’au Togo. Après, ne nous étonnons pas que le niveau scolaire baisse globalement et que les débats sont si pauvres de profondeurs sur les réseaux sociaux et les médias traditionnels », a déploré le député Gerry Taama, auteur du roman « Parcours de combattants ».
Le dramaturge Prof Togoata Apedo-Amah a également eu la même réaction: « Une grande librairie qui disparait est un monde anéanti, c’est une catastrophe. C’est tout un monde qui disparaît. Ce monde est celui de la culture et surtout de l’imaginaire individuel et collectif nourrit par les livres », a indiqué l’auteur de la pièce de théâtre « Le chien qui fume ».
Pour l’universitaire, l’une des raisons principales de cette extinction des librairies au Togo est le coût élevé des livres. Il pointe du doigt l’Etat. « La relative cherté des livres au Togo fait passer cet objet culturel précieux pour un produit de luxe. Pourquoi ? L’État togolais porte une grande responsabilité dans le coût élevé des livres, ce qui pénalise non seulement les lecteurs potentiels, dont les jeunes scolaires et étudiants, mais aussi les auteurs, les éditeurs, les libraires, les imprimeurs et les enseignants, bref, toute la chaîne du livre. Nous avons envie de pleurer pour ce pays. C’est un monde qui s’effondre », a-t-il fait observer.
De toute évidence, la culture du livre et de la lecture n’est plus dans les habitudes des Togolais. Certains observateurs essaient d’expliquer ce phénomène en avançant l’idée selon laquelle, les Togolais ont trop faim, et qu’ils sont davantage préoccupés à remplir leur panse qu’à remplir leur tête.
Cependant, il est paradoxal de constater qu’en dépit de la situations dans le pays, on observe une augmentation notable des établissements de restauration, des auberges, des boîtes de nuit et des Rooftops, tandis que les bibliothèques et les librairies sont en voie de disparition.